Avec Ex Libris : The New York Public Library ou encore At Berkeley pour ne citer que ses derniers titres, Frederick Wiseman nous a habitués à des documentaires fleuves dressant un portrait complexe de l’Amérique contemporaine. La durée de ses films, si elle reste exceptionnelle, tend à atteindre une forme d'exhaustivité sur les sujets qu'il choisit de traiter, et construit peu à peu une œuvre magistrale. City Hall est une nouvelle pierre à cet édifice : l'autopsie de la gestion d'une ville, aux antipodes de la politique fédérale menée par Trump.
Ce City Hall est donc celui de la ville de Boston. Une ville bien connue de Wiseman puisqu'il y a grandi. La politique menée par son maire démocrate Martin Walsh est exemplaire et témoigne d'une certaine idée des institutions et de la démocratie. Les équipes travaillent dans un esprit participatif et collaboratif avec les citoyens à la mise en place d'une action ambitieuse en matière de justice sociale, d'accès au logement, de lutte contre l’exclusion et en faveur du climat. Le film immerge totalement le spectateur dans l'ambiance de Boston : côté pile, le visible et côté face, l'envers du décor. Il décortique et nous montre tout. Si l'on décèle les failles qui peuvent sous-tendre chaque sujet abordé, on constate également la belle énergie déployée par les acteurs de la vie locale. C'est notamment dans sa durée que City Hall puise sa force : si le début peut sembler un peu ardu, certains témoignages retranscrits dans leur intégralité révèlent l'essence même des valeurs américaines. Wiseman nous offre ainsi – encore une fois – une vision bien différente de celle véhiculée par les médias !