«La technologie permet de faire des choses qu’on ne pouvait pas faire avant et qu’on n’avait pas besoin de faire ! Elle crée des besoins bizarres : si on ne répond pas immédiatement à un de nos mails ou appels, on s’inquiète. Tout cela change nos relations. » Keren Ben Rafael
Julie et Yuval s’aiment d’un amour fusionnel mais doivent faire face à une séparation forcée du jour au lendemain. Lui est coincé à Tel Aviv, sa ville natale, en attendant que sa situation administrative se débloque, elle dans leur appartement à Paris avec leur bébé. Ils continuent tant bien que mal à vivre ensemble, par procuration. Ils se parlent nuit et jour, des mois durant, par écrans interposés. Si dans un premier temps, l’écran recrée une illusion d’intimité, il accentue petit à petit la frustration de ne pas être ensemble et désincarne à petit feu leur amour comme leur désir. Plus rien de charnel, que des pixels. Jalousie, surveillance et impuissance s’installent lorsque les réponses ne sont pas immédiates ou celles attendues. Attendu comme le retour de plus en plus incertain de Yuval...
Après le charmant Vierges, Keren Ben Rafael s’entoure d’un casting exemplaire pour ce deuxième long-métrage particulièrement réussi. Sur le concept pourtant très simple, voire basique, du champs contre-champs – les deux personnages sont littéralement séparés tout le long du film – la réalisatrice parvient avec une justesse déconcertante à partager un quotidien amoureux qui se délite entre légèreté et angoisse. Suite au confinement, à l’heure de la sur-connexion et du télétravail, À cœur battant prend une toute autre résonance et vient nous hanter longtemps après la projection.