C'est un long périple, de plus de 10 heures, auquel nous convie Jean-Pierre Lledo. Un voyage, sinueux, chaotique, qui éveille la curiosité, mais ne va pas sans interrogation, voire malaise et indignation. Un voyage, confie son auteur, pour braver le plus grand des tabous : Israël. Impossible d'y mettre les pieds, pour lui, fils de communiste, qui a grandi en Algérie après l'indépendance et ne l'a quittée qu'en 1993, fuyant l'islamisme. En 2008, à l'invitation de la cinémathèque de Jérusalem, il brave cet interdit. Première étape d'un retour, pour ce fils de mère juive. Mais retour à quoi et où ? Ce sont les questions auxquels le documentaire entend répondre. Retraçant l'histoire d'Israël, analysant son identité et la nature du judaïsme. Le réalisateur ne prétend pas, affirme-t-il, à l'objectivité. De fait, la contradiction n'y est pas de mise, en particulier sur des sujets aussi douloureux et épineux que la naissance d'Israël et le droit au retour des Palestiniens. Arabes et musulmans ne sont d'ailleurs vus qu'à travers un seul prisme : leur haine des Juifs et leur refus de l'existence d'Israël. En même temps, Jean-Pierre Lledo parle de fraternité et affirme réaliser des films pour faire le deuil d'une défunte Algérie multiethnique. Rien de simple donc dans ce voyage. Et l'entreprendre n'est pas sans risque.
La première partie, Kippour (2h20), est l’occasion de poser le contexte historique, en montrant combien l’antisémitisme est inséparable de la question politique et territoriale. Ce sera un fil rouge durant les quatre parties de ce voyage introspectif et quête d’origine, tant cette spécificité marque la relation intime à soi-même, à ses proches et au monde.
Olivier Parlet