Kathryn Bigelow s'attaque à un événement qui a profondément marqué la mémoire collective américaine. Été 1967. Les États-Unis connaissent une vague d’émeutes sans précédent. La guerre du Vietnam, vécue comme une intervention néocoloniale, et la ségrégation raciale nourrissent la contestation.
À Detroit, alors que le climat est insurrectionnel depuis deux jours, des coups de feu sont entendus en pleine nuit à proximité d’une base de la Garde nationale. Les forces de l’ordre encerclent l’Algiers Motel d’où semblent provenir les détonations. Bafouant toute procédure, les policiers soumettent une poignée de clients de l’hôtel à un interrogatoire sadique pour extorquer leurs aveux. Trois hommes, non armés, seront abattus à bout portant, et plusieurs autres blessés. Les émeutes de Juillet 1967 à Détroit dureront cinq jours, causeront la mort de 43 personnes et laisseront 467 blessés…
Kathryn Bigelow, longtemps présentée – manifestation ordinaire du sexisme tranquille – comme la compagne puis l'ex-compagne de James Cameron, a aujourd'hui gagné haut la main ses galons de réalisatrice qui compte, dépassant en reconnaissance le réalisateur de Titanic. Nous n'avons pas jusqu'ici programmé ses films (sauf les deux premiers, Aux frontières de l'aube et Blue steel – 1987 et 1989, ça remonte ! –, deux petites productions indépendantes, deux variations excitantes autour du film de vampires et du polar) parce que leurs sujets et leurs styles (thrillers musclés, film de guerre, traque de Ben Laden) les éloignaient de nos salles, et plus encore le type de sortie, mode blockbuster, choisi par leurs distributeurs. Mais on a beaucoup regretté de ne pas avoir montré à Utopia le formidable Démineurs.
Nous n'avons pas pu voir Detroit, qui nous sera montré seulement début septembre. Mais le thème du film, présenté plus haut, nous intéresse évidemment au plus haut point, d'autant qu'il s'inscrit dans la droite ligne du magnifique I am not your negro, le documentaire de Raoul Peck que nous avons ardemment défendu et montré pendant plusieurs semaines (y compris en présence de Raoul Peck en juillet, rencontre mémorable). Et il se trouve que le film est distribué en France par Mars Films, distributeur indépendant avec qui nous travaillons régulièrement. Et ça change tout !
Par ailleurs, quelques journalistes triés sur le volet ont pu découvrir le film au début de l'été, et leurs réactions sont unanimement enthousiastes. Deux exemples :
« A partir d'un scénario où l'on retrouve les mêmes qualités que dans Démineurs et Zero Dark Thirty, soit un gigantesque travail d'investigation et une impressionnante capacité à trouver une forme narrative à cette enquête, Kathryn Bigelow réalise l'un des films les plus impressionnants de ces dernières années. Le travail sur la photo, en phase avec les images d'archives, et offrant un impressionnant réalisme, le casting parfait dans un film choral et donc si compliqué à réaliser, la manière de relier un faits-divers à la grande histoire des Etats-Unis, offrent un film exceptionnel. » (S. Blumenfeld, Le Monde)
« J'ai trouvé le film de Kathryn Bigelow réellement très impressionnant. Par sa construction, avec le fait que l'on s'approche tout doucement, comme en spirale, du lieu dramatique où va se dérouler l'intrigue et sa montée en puissance. Par sa mise en scène, ensuite, qui est parfaite, sa photo superbe, cette tension qui monte de façon incroyable et ces acteurs qui sont tout simplement dingues. Bravo à elle, vraiment. » (C. Ono-dit-Biot, Le Point)
Avouez que ça donne envie !