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Il y aura sans doute quelque chose de salutaire que de venir découvrir, en cette fin d’année toujours propice aux excès, l’incroyable portrait de cet homme ascète ayant fait le choix de renoncer aux biens terrestres pour vivre retiré loin de la compagnie des hommes dans une grotte à 3000 mètres au cœur des montagnes de l’Himalaya. Sans doute, nous tous, accros à la technologie et aux bienfaits de la « modernité », confortablement installés dans nos vies remplies de choses futiles et inutiles, nous sentirons-nous tout petits riquiquis devant la grandeur d’âme de Suraj Baba. Et sans être adeptes de la méditation ou portés sur la chose spirituelle, nous reviendrons de cet étonnant voyage du bout du monde avec l’envie peut-être de se détacher un peu, même un tout petit peu, des entraves matérielles qui parfois nous rendent le cœur tout sec…
Issu de la bourgeoisie indienne, Suraj Baba a un jour fait le choix de tout quitter pour partir vivre seul aux sources du Gange, fleuve sacré. Le pourquoi de ce choix, on ne le connaîtra pas, et qu’importe : on saisit la vie de Suraj au vol et au temps présent. L’homme a le visage tanné par le soleil de ceux qui vivent dehors par toutes saisons et par tout temps, une barbe à l’infini et un sourire immense qui raconte un peu le bonheur de son choix de vie.
Mais quelque chose pourtant vient perturber la quiétude de son âme… Suraj Baba n’est pas tout à fait en paix avec lui-même et il flotte dans sa grotte comme un sentiment diffus d’intranquilité… Aussi, après huit ans d’isolement et de méditation, il prend le risque de s’exposer à nouveau au monde : quitter son refuge et ses montagnes pour se joindre aux autres « sâdhus » lors d’un immense rassemblement , la « Kumbha Mela » qui réunit tous les 12 ans plus de 70 millions de pèlerins au pied de l’Himalaya, au bord du Gange. Le film suit le périple de ce sage, du silence absolu des montagnes au tumulte bruyant du rassemblement des Sâdhus. Au fil de son périple initiatique, Suraj Baba nous fera partager ses joies, ses questionnements et réflexions et dans des paysages grandioses autant que dans les scènes de foule hallucinantes, le spectateur devient le témoin privilégié du destin unique de cet homme autant que de l’incroyable pouvoir de la méditation. Un film fort et beau pour un homme dont la force et la beauté de l’âme imposent le respect.
À propos des sâdhus : du sanskrit « homme de bien, Saint Homme », le sâdhu fait vœux de pauvreté et chasteté. Il est le personnage mythique de l’Inde, représentant à la fois la philosophie et le rejet des biens matériels au profit de la spiritualité. « Sadh » signifie la vérité et « sâdhu », celui qui cherche la vérité. Les sâdhus coupent tout lien avec leur famille, n’ont aucune richesse. Ils vivent retirés ou mendient sur les routes d’Inde et du Népal en se nourrissant du don des dévots. Ils constituent aujourd’hui 0.5% de la population indienne, mais les authentiques sâdhus ne se montrent généralement pas en dehors de la Kumbha Mela. Ils pratiquent la méditation.
Plus grand rassemblement religieux au monde, la Kumbha Mela est un pèlerinage qui a lieu tous les douze ans au pied de l’Himalaya au bord du Gange. Elle attire des millions de pèlerins. Cette fête reflète le mélange complexe de valeurs religieuses et culturelles qui forment le tissu de la société indienne.
La Kumbha Mela contenait jadis le nectar d’immortalité. Se baigner dans le Gange, fleuve sacré, assurerait donc aux fidèles une totale rémission de leurs fautes.