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Quand Tracy rencontre Brooke...
Six mois à peine après l'excellent et très drôle While we were young, voici le très drôle et excellent Mistress America. Noah Baumbach va devenir notre fournisseur attitré en comédies américaines indépendantes, intelligentes et stylées ! S'il réussit à tenir la qualité et le rythme (deux films en un an : mieux que Woody Allen, dont on disait dans le texte de présentation de son précédent opus qu'il était le successeur le plus qualifié), nous sommes prêts à lui signer un contrat à durée indéterminée… La Mistress America du titre, c'est Brooke, interprétée par Greta Gerwig (qui impose ici un tempérament comique hors du commun), également co-scénariste du film (c'était déjà le cas pour Frances Ha, disponible en Vidéo en Poche). Mais pour entrer dans l'histoire, il faut passer par Tracy : c'est elle le personnage central, ce sont ses yeux et ses mots qui nous serviront de guide.
La réservée, la presque timide Tracy (parfaite et attachante Lola Kirke) débute sa première année d'études littéraires dans une université de Manhattan… et on ne peut pas dire que ce soit la joie. Ses cours sont plutôt ennuyeux, sa camarade de chambre est plutôt revêche, ses condisciples sont plutôt banals… Bref son entrée dans la vie étudiante new-yorkaise, qu'elle rêvait enrichissante, surprenante, excitante… est plutôt décevante. Il y a bien Tony, qui partage son goût pour l'écriture – ils s'échangent et critiquent mutuellement leurs premières tentatives – mais il a un côté mollasson assez désespérant… et en plus il se fait mettre le grappin dessus par une Nicolette ultra-possessive et méga-jalouse. Pas grand chose à espérer donc sur le campus. Alors quand sa candidature au cercle littéraire qu'elle voulait intégrer est rejetée par les abominable snobinards du comité de rédaction, elle se persuade qu'il faut peut-être aller voir ailleurs si l'air est plus vivifiant et se résout à contacter – comme le lui demande sa mère, avec insistance, depuis son arrivée à New-York – la fameuse Brooke.
Mais qui donc est cette Brooke ? C'est en fait sa future demi-sœur : son père va incessamment sous peu épouser la mère de Tracy, c'est censé créer des liens aussi immédiats que durables… Tracy n'y croit guère mais la première rencontre va être ébouriffante : Brooke est une sorte de tornade blonde, exubérante, enthousiaste, qui habite Times Square, « the place to be », dans un appartement bric-à-brac qu'elle a évidemment décoré elle-même – et qu'elle occupe de manière plus ou moins clandestine –, qui connaît tout un tas de gens formidables, qui déborde de projets tous plus épatants les uns que les autres, dont le plus immédiat est l'ouverture d'un resto-salon de coiffure-galerie d'art-centre communautaire, il faut juste qu'elle arrive à convaincre un partenaire financier et l'affaire est faite… Sans avoir le temps de dire ouf, Tracy est emportée dans le tourbillon de cette fille rigolote, spontanée, grande gueule et touche-à-tout, qui aurait tout pour être exaspérante si on ne sentait pas en elle une vraie générosité et une grande fragilité…
La suite des événements montrera en effet que Brooke a peut-être plein de relations mais pas vraiment d'amis, plein de désirs mais peu de conclusions, plein d'idées mais qui n'aboutissent jamais ou alors qu'on lui pique. C'est ainsi, prétend-elle, que son ex-meilleure amie Mamie Claire s'est appropriée une de ses idées qui lui a apporté la fortune. Et en même temps Mamie Claire lui a fauché son boyfriend et ses chats ! Brooke décide donc d'aller affronter cette traîtresse pour la pousser à investir dans sa future affaire, car il faut vous dire qu'entre temps son bailleur de fonds s'est désisté… Et pour cette confrontation décisive, elle embarque sa demi-sœur putative, flanquée par un concours de circonstances de Tony et Nicolette… L'équipée sera particulièrement hilarante !