Avec Paul Vecchiali, tout commence comme dans une ancienne rengaine de faubourg, feutrée et lancinante. Puis le ton monte, par petites touches d’abord imperceptiblement, puis acides, électriques enfin comme l’orage, jusqu’à ce que le refrain se gonfle puis éclate en des échos désespérés. On se sort jamais du café éclairé au néon. Lugubre à souhait. Les Jules ne sont que de pauvres bougres sinistres. Et pourtant, on se s’ennuie pas un instant dans ce film riche en caractères, si plein de vrais personnages (et d’excellents comédiens) pris sur le vif d’un mal de vivre qu’on n’aurait probablement pas remarqué si l’on n’était pas entré dans ce bistrot du coin, en se demandant ce qu’on est venu y faire. C’est tout l’art de Vecchiali, de livrer en quelques images closes, tout un monde, au passage, et de savoir retenir ces petits riens brisés, frelatés, qui flottent dans l’air des villes et des banlieues sans qu’on prenne le temps de sentir à quel point ils sont irrespirables.