Un long solo par Charlotte Rampling : c’est ainsi que se présente le film franco-belge Hannah d’Andrea Pallaoro, en compétition à la Mostra de Venise, quatre ans après que le réalisateur ait présenté son premier long-métrage, Medeas , dans la section Orizzonti. L’actrice britannique, une icone de la beauté raffinée et inaccessible, livre dans Hannah une performance magnifique, tout en retenue bien que Rampling ne craigne pas de montrer son corps dénudé de femme de 71 ans.
L’histoire, inspirée d’un fait divers, est dévoilée lentement, à travers de petits éléments qui se mettent progressivement à former un tragique puzzle. Elle se passe en Belgique à Bruxelles et commence par le petit déjeuner de Hannah avec son mari (André Wilms), après quoi elle l’accompagne en prison et se rend à son cours d’art dramatique, une activité à laquelle notre héroïne s’accroche de toutes ses forces. Sinon, elle est à présent obligée, pour gagner sa vie, de faire des ménages chez une famille riche avec un enfant non-voyant qui a un très beau rapport avec elle. Physiquement, Hannah évolue comme si elle ne voulait pas se faire remarquer par ce monde auquel elle n’est plus liée que par un fil très fin : l’espoir que son mari est innocent. Elle va souvent le voir en prison, où il lui dit qu’il n’a pas sa place, qu’il ne va pas survivre. Et puis un jour, on frappe à la porte, mais Hannah n’ouvre pas. C’est la mère d’un enfant victime d’abus qui hurle : “Mais tu n’as pas honte ?”. On comprend alors de quoi le mari est accusé. On apprend aussi que c’est son propre fils qui l’a dénoncé. Ce dernier vit désormais en banlieue avec sa famille et refuse tout contact avec ses parents. Quand Hannah essaie d’apporter un gâteau d’anniversaire à son petit-fils, elle se voit même refuser l’entrée au seuil de la porte. Sa vie achève de s’effondrer quand elle découvre des preuves de la culpabilité de son mari, l’homme qui a été à ses côtés pendant 45 ans. À ce moment-là, curieusement, Hannah est intriguée par la nouvelle d’une baleine échouée sur la plage de Knokke-Heist dont les autorités ne savent pas quoi faire. Elle se rend sur cette plage et observe la scène, métaphore de son existence : un cétacée échoué. Bien que sa situation soit tragique, on a du mal à avoir de l’empathie pour l’héroïne. La mise en scène de Pallaoro reste en effet volontairement distante, refroidissant aussi les émotions en usant de tout l’attirail sophistiqué typique des films d’auteurs : des dialogues réduits à leur plus simple expression, une caméra qui reste fixe sur de longues séquences, une photographie glacée. Cette approche exalte cette énième performance de grande artiste par l’actrice culte – Charlotte Rampling dont les yeux verts, magnétiques et tristes, lui ont valu le surnom de “The Look”.