On se souviendra longtemps des regards effrontés et perdus de Céleste et de Sihem, interprétées par deux jeunes comédiennes éclatantes de justesse et de fragilité… Pas facile de quitter la fête… de dire adieu aux vieux potes, d’en finir avec l’ambiance de joie, de plaisir et d’insouciance, de quitter des lieux dans lesquels on aimerait s’éterniser, encore un tout petit peu, histoire de ne pas renouer avec la vraie vie, celle qui n’a rien d’un conte de fées, et encore moins d’un tour de grande roue. La fête, elle met des étoiles dans les yeux, elle est bruyante, elle scintille, elle en fait voir de toutes les couleurs, elle apporte la douceur et la légèreté, mais aussi la puissance et la force. Mais la fête, c’est aussi une fausse amie, elle est vicieuse et manipulatrice, elle enrobe avec ses belles paroles, elle endort, elle étouffe, elle fait miroiter des jours meilleurs pour mieux enfoncer les têtes dans l’eau crasse de toutes ses désillusions.
La fête : ce n’est pas celle que l’on connaît, les flonflons, les pistes de danse et les rires entre amis… La fête dont il est ici question, elle est de mauvaise réputation, donne de mauvais conseils et avance en meute. Ses complices sont la dope, la défonce, la came, toutes ces substances illégales ou pas qu’une âme est capable d’infliger à son corps pour mieux supporter la vie, pour planer, pour voir ailleurs, pour voir plus grand, plus haut, plus loin…
La fin de cette fête, vous l’aurez alors compris, c’est bien l’histoire d’un début, d’une renaissance et surtout celle d’un douloureux mais indispensable retour à la vie.
Céleste et Sihem arrivent le même jour dans un centre de désintoxication où leur histoire, meurtrie par bien des expériences avec la came, les as poussées comme dans un ultime instinct de survie. Elles ne se connaissent pas et n’ont pas grand chose en commun, ni leur âge, ni leur passé, ni leurs attaches, rien, hormis ce dénominateur commun toxique qui les a passablement abîmées. Jour après jour, au fil des séances de groupes de parole, un lien fort va se tisser entre les deux filles, nourri par des fous rires et quelques éclats de rage et de colère vis-à-vis d’un encadrement strict et rigide… Et fatalement, elles vont se faire virer du centre. Livrées à elle-même, « clean » mais pour combien d’heures, de jours, de semaine, encore ? elles vont devoir affronter le monde réel, ses mirages, ses tentations et sa dureté.
Le vrai combat commence alors, celui de l’abstinence. Chacune va devoir, enfin, être elle-même tout en restant maladivement accrochée à cet autre si différente et si semblable : amie de cœur, sœur de combat. Entre Sihem et Céleste, les places ne seront jamais clairement définies, tout sera en perpétuel mouvement. Céleste, que l’on pourrait croire la plus fragile des deux, va se révéler explosive et indomptable. À l’inverse, Sihem, sous ses airs de dure à cuire, va finalement révéler la nature brute de ses blessures intimes.
Rien ne sera joué, rien se ne sera gagné d’avance et à travers ces deux jeunes femmes, portées par un élan vital finalement plus fort que l’instinct de mort, c’est un hommage magnifique à toutes celles et ceux qui se battent contre leurs démons intérieurs pour gagner un an, un mois, une semaine ou simplement un jour « sans ».