Todo modo
Dans ce thriller économico-religion par Andò, l’acteur napolitain joue entouré d’une troupe internationale d’excellence : Daniel Auteuil, Connie Nielsen, Pierfrancesco Favino et Marie-Josée Croze. Dieu ne joue pas aux dés. Mais les banquiers, oui. C’est peut-être pour cela que le moine de l’ordre des Chartreux Roberto Salus (ce qui signifie notamment salut en latin) a été invité en secret à une réunion du G8, avec une rock star et une auteure de best-sellers pour enfants. Après un dîner avec des ministres influents venus des quatre coins du monde (tous montrés avec ironie en train de faire la queue pour approcher la rock star qui chante « Walk on the Wild Side » de Lou Reed), on comprend les raisons de la présence ici du religieux peu accoutumé à tout ce protocole, lui qui pratique plus volontiers le jeûne et la méditation. Daniel Roché, le chef du Fonds monétaire international (incarné par Daniel Auteuil), veut en effet se confesser, car il a obtenu de la vie tout ce qu’il souhaitait, mais souffre à présent d’une tumeur fatale.
Juste après leur rencontre, Roché est retrouvé mort, apparemment par suicide. À ce moment-là, le film bascule dans un genre qu’on pourrait qualifier de « thriller économico-religieux ». Les ministres sont en effet réunis pour discuter de l’adoption d’une mesure secrète qui aura pour effet de briser les pays les plus pauvres, or le moine silencieux vient de recevoir la dernière confession du cynique directeur du FMI ! De fait, dans toutes les langues (la troupe comprend notamment Connie Nielsen, Pierfrancesco Favino, Marie-Josée Croze, Moritz Bleibtreu et Lambert Wilson), les ministres et autres invités de la conférence ainsi que ses organisateurs vont essayer d’interroger le moine. Ce qu’ils ignorent, c’est que Salus est là pour semer le doute dans les esprits des seigneurs de l’économie mondiale, déranger leurs certitudes, les porter à se rendre compte qu’ils sont en train de commettre une grave erreur et révéler leurs faiblesses et autres malheurs.
Tout en faisant écho au Todo modo d’Elio Petri (1976), bien que le réalisateur dise s’être référé aux atmosphères de Polanski et Hitchcock, la mise en scène (et la photographie du formidable Maurizio Calvesi) et les décors, juxtaposés à la présence de Servillo, renvoient aussi au dernier Paolo Sorrentino. Andò, qui en est à son dixième long-métrage, n’adopte pas le ton de l’irrévérence par rapport aux puissants et les riches qu’il nous décrit, préférant rester à cheval entre réalisme et parabole sur le pouvoir, se préoccupant avant tout de construire un film qui confronte politique et conscience de la vérité et qui brouille, comme le faisait son film précédent, Viva la libertà, les cartes de l’art de gouverner.