Ayant tourné peu (une foi tous les vingt ans!), Djibril Diop Mambéty tente – avec succès – de confronter des éléments de culture africaine à des thèmes ou à des modes d'expression étrangers, sans jamais tomber dans le décalque de formes déjà existantes. Dans Touki Bouki (1973), son précédent film, il mettait à mal un certain nombre d'idées reçues sur la famille, le sexe, en bâtissant un véritable road movie à l'africaine, adaptant les codes du «genre» au contexte local. Dans Hyènes, le cinéaste mélange des éléments tirés d'une pièce de Friedrich Dürrenmatt à des souvenirs personnels liés à la vision d'une prostituée hautaine qui l'obséda durablement pour qu'il envisage, dans un premier temps, de lui consacrer une biographie romancée. Cet apologue, tournant autour du destin d'une vieille femme spoliée de ses droits élémentaires dans sa jeunesse et qui réclame vengeance du haut de sa fortune, s'applique parfaitement à l'Afrique contemporaine qui vit, depuis trente ans, le retour de nombreux refoulés: néocolonialisme, désir d'imiter l'Occident tout en regrettant la perte des anciennes valeurs communautaires… Le personnage de Linguère Ramatou synthétise toutes ces contradictions dans une forme qui est plus symbolique que naturaliste.