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Un jeune poète, si l’on veut, est une ode burlesque à Paul Valéry (à ce qu’il en reste à Sète : une tombe, une vision, une mer toujours recommencée). Cela change des hagiographies muséales ou des pantalonnades verbeuses. Ici, Valéry compte pour beaucoup, mais il compte aussi pour rien : et c’est la beauté de ce Jeune poète. Une beauté libre, une beauté en tongs. Une présence au monde où l’humour et l’inquiétude font bon ménage. Ce qui traduit, l’air de rien, l’air du temps. Damien Manivel est un réalisateur qui s’est fait remarquer avec ses courts métrages (il était passé par Amiens avec la Dame au chien en 2010, où l’on trouvait déjà son acteur fétiche, Rémi Taffanel). On y devinait très tôt la qualité limpide de sa mise en scène : cadrer un lieu, en trouver le génie, et se demander comment on peut l’habiter. Damien Manivel a réalisé Un jeune poète dans les marges d’un système dont le ressac administratif rejette la fraîcheur créative. On trouve dans son film à la fois une impatience de filmer et une douce sérénité d’avoir filmé.