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Quand Kwon revient à Séoul après une convalescence à la montagne, elle trouve une liasse de lettres de Mori. Revenu du Japon pour lui déclarer sa flamme à nouveau, il s’étonne de ne pas l’avoir trouvée et lui raconte son attente près de chez elle, dans le quartier traditionnel de Bukchon. Au trouble de ce petit « paquet d’amour » s’ajoute le décalage délicieusement ludique du découpage de Hong Sang-soo : la liasse tombée à terre puis ramassée, les lettres se sont parfois mélangées. Leur récit qui devient la chair du film déroule donc ses flashbacks légèrement dans le désordre. Un désordre amoureux proche de l’état de Mori, qui ronge son frein entre un café japonisant au nom faussement prometteur (la Colline de la liberté) et la petite cour de la pension de famille où il séjourne, véritable théâtre de poche. Le réalisateur observe avec sympathie, sans méchanceté ni attendrissement facile, ce personnage ainsi que tous ceux qui croisent sa route et comme lui exposés parfois au ridicule et à la perplexité dans un film qui frôle l’absurde tranquillement, sans forcer le trait, et semble avancer de lui-même, sans se soumettre aux contraintes du vouloir dire, mû par une espèce de folie lucide, de griserie mélancolique à la fois joyeuse et désillusionnée. « Rimes, plis, répétitions, replis et variations rythmiques – Hong Sang-soo travaille autant en compositeur inspiré qu’en origamiste virtuose. »