Caricaturistes - Fantassins de la démocratie -12

SPÉCIAL CANNES

Ce matin était projeté dans la salle Bazin en séance spéciale hors compétition un film exceptionnel CARICATURISTES - FANTASSINS DE LA DÉMOCRATIE

À l'origine du projet de ce documentaire, il y a l'amitié entre Radu MIHAILEANU, réalisateur de films, et PLANTU, caricaturiste pour le Journal Le Monde depuis 40 ans. Une admiration réciproque et des valeurs communes débouchent sur l'envie de créer un film ensemble. L'idée : parler du combat des caricaturistes pour la démocratie, du risque permanent qu'ils encourent et du fait que les réactions et débats qu'ils suscitent donnent un subtil aperçu de l'état de la liberté d'expression et de la démocratie. En dessinant sur des thèmes aussi forts que la religion, l'économie, la finance, la politique, la guerre... Les caricaturistes testent en permanence le degré « démocratique » de leur pays et s'exposent en première ligne : ils sont les fantassins de la démocratie.

Le titre de ce vivifiant documentaire dit bien le propos de ses auteurs : réaliser un film-engagement pour mettre en avant les caricaturistes, les dessinateurs de presse, ces femmes et ces hommes à la fois journalistes, artistes, humoristes et combattants – et pour certains, dans certains pays, ce combat nécessite un sacré courage ! Un film-engagement pour la liberté d'expression, pour la liberté des peuples, pour le droit à la démocratie. Un film-engagement qui est tout sauf plombant, tout sauf lénifiant, tout sauf emmerdant. Il est au contraire incroyablement vivant et dynamique, positif et plein d'espoir, grâce aux rencontres qu'il nous ménage avec une douzaine de ces caricaturistes qui ont tous une personnalité bien trempée, qui dégagent tous une énergie communicative.

Le tournage, réalisé par une équipe très légère, mobile et tout terrain, nous entraîne sur les pas des dessinateurs, dans le quotidien de leur pratique. À Moscou, de nuit à bord du taxi de Zlatkovsky dans lequel il a travaillé « illégalement » pour joindre les deux bouts lorsque Poutine a interdit toutes caricatures de sa personne ; à New-York, ville d’ombre et de lumière où Danziger dénonce les ravages de la loi du « Business » broyant tout sur son passage, avenir, bonheur et liberté ; en Chine où Pi San dénonce le système politique et social chinois avec des dessins animés très créatifs évoquant l’importance de sa liberté intérieure ; à Tunis où l'intrépide Nadia Khiari sème les croquis de Willis from Tunis, son chat impertinent et irréductible, sur les murs de la ville ; au Maroc, où l'algérien exilé Slim continue de combattre les Barbus intégristes après avoir caricaturé le président Chadli en 1984 et vu 80 000 exemplaires de son journal passés au pilon… On ne les cite pas tous mais il faudrait, tant leur expérience à chacun est passionnante et éclairante.

Celui qui est un peu notre guide dans ce monde du dessin qui bouscule, qui interroge, qui critique, qui ironise, qui ridiculise, mais qui sait aussi exalter et magnifier… notre guide donc, c'est Plantu, l'éclaireur de la première page du Monde, le sien, le journal. Plantu qui a fondé avec Kofi Annan, alors secrétaire général des Nations Unies, l'association « Cartooning for Peace », une structure de résistance créant une chaîne solidaire de caricaturistes qui vont communiquer, se défendre les uns les autres, devenir amis. Au-delà des frontières, des cultures, des régimes idéologiques, des appartenances religieuses. L'association compte aujourd'hui cent membres, le film nous en fait découvrir douze parmi les plus talentueux, les plus généreux, les plus indispensables.