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Magistral
Allemagne, 1912. Friedrich Zeitz est un tout jeune diplômé d’origine modeste, prêt à travailler d'arrache-pied pour s'arracher à sa condition. Il est intelligent, il est tenace, il est ambitieux, il sait vaincre la timidité que lui impose ses origines pour faire preuve de sa valeur et de des capacités… C'est ainsi qu’il attire l'attention de Karl Hoffmeister, patron d'une assez importante usine de sidérurgie. Et qu'il en devient le collaborateur dévoué, efficace et de plus en plus apprécié…
L’état de santé de l'entrepreneur se dégrade et lui impose de rester chez lui, dans sa belle demeure bourgeoise en périphérie de la ville. Hoffmeister en arrive rapidement à proposer à Friedrich de venir lui-même s'y installer : il y a toute la place nécessaire et ce sera beaucoup plus pratique pour l'organisation quotidienne du travail. Le jeune homme ne se fait pas prier, c'est l'occasion pour lui de quitter le gourbi qui lui sert de logement. Ce déménagement le fera abandonner Anna, l'ouvrière mignonnette qui en pince pour lui mais c'est comme ça, l'ascenseur social oublie toujours du monde au rez-de-chaussée…
C'est donc sur l'invitation du mari que Friedrich va faire la connaissance de sa beaucoup plus jeune épouse, la très belle, très distinguée, très réservée Lotte. Le jeune homme s’éprend d’elle quasi-immédiatement, sans oser révéler ses sentiments, sans oser se les avouer à lui-même. Dans l'opulence feutrée de la demeure, couve cette passion amoureuse muette et corsetée, tout en regards et en silences, en frôlements qui sont autant de caresses fantasmées…
Jusqu'au jour où Hoffmeister, convaincu par l'enthousiasme visionnaire de celui qui est devenu son bras droit, décide tout de go de l'envoyer au Mexique, où il supervisera l'exploitation de mines de fer. L’annonce de ce départ précipité provoque une accélération des sentiments, qui finissent par se dire ouvertement. L'amour éperdu de Friedrich était bien partagé, Lotte vibrait à l'unisson. La présence du mari malade – personnage intéressant, complexe, qui de toute évidence devine ce qui est en train de se passer et qui semble l'accepter : on n'arrive pas à se persuader que sa décision de dépêcher son jeune collaborateur aux Amériques soit dictée par le désir de l'éloigner de son épouse – interdit à leur amour de s’accomplir ici et maintenant. Lotte fait alors une promesse, la fameuse promesse : au retour de Friedrich, dans deux ans, elle sera à lui. Mais le destin ainsi que le cours de l'Histoire vont se montrer contrariants…
« La nouvelle de Stefan Zweig est une merveille de concision, comme si l'auteur avait eu à cœur de se débarrasser de tout ce qui ne nourrissait pas directement l'histoire et les sentiments. L'adaptation que nous avons écrite respecte cette volonté de s'en tenir à l'essentiel, pour que chaque scène vibre de quelque chose de secret, de non-dit et d'aveuglant.
« Il n'est question que de sensualité et de désir. Aimer sans savoir si l'on une chance d'être aimé en retour. Rêver sans pouvoir exprimer son rêve. S'en tenir au secret. Mais vivre et se nourrir de regards, d'effleurements interdits. Filmer la peau, l'envie d'une caresse… Le texte de Zweig pose une question magnifique : est-ce que le désir amoureux résiste au temps ?