« Depuis les débuts du rock'n roll, peu de groupes peuvent se comparer aux Stooges avec leur mélange incomparable de pulsations viscérales, de psychédélisme déjanté, de rythmes à la fois blues et country portant des paroles névrotiques minimalistes. Sans oublier Iggy Pop, le leader du groupe, fauve grognant et grondant mais soucieux de son apparence qui réincarne aussi bien Nijinski, Bruce Lee et Harpo Marx qu'Arthur Rimbaud. Pionniers dans l'histoire du rock, les Stooges ont marqué des générations entières d'artistes » Jim Jarmush
Rien de plus opposé a priori que la douceur minimaliste dePaterson et l'énergie sauvage de Gimme danger… Et pourtant le cinéaste y aborde finalement le même sujet : le processus créatif. Celui, réglé, ritualisé, millimétré du chauffeur de bus poète Paterson, humble créateur d'une œuvre d'une fantaisie et d'une délicatesse infinies. Et celui, plus violent, plus agressif, plus transgressif, des Stooges, l'un des meilleurs groupes de rock de l'histoire selon Jim Jarmush.
Ce n'est pas vraiment un documentaire que nous propose Jarmush, mais plutôt une sorte de déclaration d'amour filmée aux Stooges. Un essai, comme le qualifie le réalisateur lui-même, composé en toute subjectivité, pour essayer de nous convaincre que les Stooges ont été et resteront, définitivement, parmi les tout meilleurs. Nous sommes en pleine révolution contre-culturelle, dans l’Amérique de la fin des années 60. Et le rock animal et survolté des Stooges fait des ravages. Ils poseront les fondations de ce qu’on appellera plus tard le punk et le rock alternatif.
Mais c’est moins de cette épopée que de leurs aventures et mésaventures des débuts dont il est question. De leurs expérimentations où nous suivons le guide Iggy, l’iguane à la voix rauque qui nous parle de son enfance. De ce fameux parc à roulottes où il vivait avec ses parents. De sa façon de bouger, essayant, explique-t-il « d’imiter les chimpanzés ou les babouins ».
C'est aussi un retour sur le contexte politique, social et culturel de l'époque qui nous est proposé. Avec, comme en contrepoint, une mise en scène très classique, où de superbes images et photos d'archive, dont pas mal d'inédites, viennent entrecouper les entretiens avec Iggy Pop et les autres membres successifs encore vivants du groupe.
« Donne-moi du danger petite étrangère. Et je sens ton soulagement. Donne-moi du danger petite étrangère. Et je sens ta maladie. Il n'y a rien dans mes rêves. Juste quelques souvenirs horribles. » (Paroles de Gimme danger, chanson des Stooges)