Enfant unique, Bo Widerberg est né à Malmö, ville portuaire de la côte sud de la Suède, le 8 juin 1930. Il y réside, presque sans discontinuité, jusqu’à sa trentième année et y écrit quatre romans et deux recueils de nouvelles. Parallèlement à cette activité, Widerberg se passionne pour le cinéma international (Demy, Truffaut, Godard ou encore Shadows de John Cassavetes, auquel il rendra hommage dans Amour 65). En 1960, Widerberg est engagé comme critique cinématographique au journal Expressen à Stockholm. Deux ans plus tard, une anthologie de ses articles est publiée sous le titre Regards sur le cinéma suédois dans lequel, à l’instar de Truffaut une décennie avant lui dans Une certaine tendance du cinéma français, il éreinte une culture cinématographique marquée par une apathie visuelle et un culte servile envers le cinéma d’Ingmar Bergman. Bo Widerberg a pourtant fréquenté le maître, dont il apprécie Jeux d’été et Monika, lorsque celui-ci monta des pièces au théâtre municipal de Malmö. Entre-temps, Bergman s’oriente, selon le reproche de Widerberg, vers des films « verticaux » - métaphysiques en somme - au lieu d’explorer les relations entre les hommes dans des films « horizontaux ». Le premier essai de Widerberg est un court métrage pour la télévision, Le Petit garçon et le cerf-volant mais Gustav Scheutz, producteur impressionné par son pamphlet, lui permit, avec un budget très modeste, de réaliser Le Landau (1963) que Pierre Braunberger, distributeur du film lors de sa sortie en France, rebaptisera Le Péché suédois, présenté à la Semaine de la Critique à Cannes en 1963. À l’été 1963, il tourne, à nouveau dans sa ville natale, Le Quartier du corbeau (1963), dans lequel il évoque le parcours d’Anders, prolétaire désirant devenir écrivain en 1936, au moment des élections qui vont entériner la victoire du Parti social-démocrate à la veille de la Seconde Guerre mondiale. À l’automne de la même année, Widerberg réalise Hello, Roland! (1966) d’après son propre roman Le Dragon vert, une satire des milieux publicitaires et de la mode. Le film à peine achevé, il tourne Elvira Madigan (1967) qui relate un fait divers authentique survenu en 1889. Composé essentiellement d’extérieurs, tourné en couleurs avec une actrice inconnue, Elvira Madigan correspond aux exigences de Widerberg et acquit une notoriété internationale. Il peut ensuite faire son choix entre les contrats que les maisons de production américaines lui proposent. Mais il est capricieux, impulsif, déteste planifier quoi que ce soit et ne respecte pas les contrats. Pourtant, après la reconnaissance internationale et le succès d’Adalen 31 à Cannes en 1969, il part aux Etats-Unis réaliser Joe Hill, portrait d’un syndicaliste exécuté à tort en 1915. Le film lui vaut pour la troisième fois consécutive une reconnaissance cannoise. De la fin des années 1960 au début des années 1970, Bo Widerberg est un cinéaste majeur de la scène internationale qui jouit autant d’un succès critique que public. Il revient en Suède tourner Tom Foot en 1974 autour d’un petit prodige du football : Johan Bergman. En 1976, il tourne Un flic sur le toit. Pendant longtemps le plus gros budget pour un film nordique, à la fois film d’action, film à grand spectacle, thriller et réflexion sur le fonctionnement des sociétés scandinaves, ce film est l’adaptation du roman L’Abominable homme de Säffle écrit par Maj Sjöwall et Per Wahlöö, les créateurs du polar nordique dans les années 60 et 70. Les années 1980 voient Bo Widerberg osciller entre le cinéma et la télévision. Il revient au polar en 1984 avec L’Homme de Majorque dans lequel deux flics poursuivent un braqueur meurtrier qui s’avère être un membre de la garde rapprochée du ministre de la Justice. Le film est une réussite. Presque dix ans s’écoulèrent avant que Widerberg ait à nouveau l’opportunité de faire un film, en 1995. Dans La Beauté des choses avec dans le rôle-titre son propre fils, Widerberg persiste dans son tableau des amours impossibles avec l’aventure amoureuse d’un jeune homme et de son professeur dans le Malmö des années 40. Le film est à nouveau nominé aux Oscars.
Bo Widerberg meurt d’un cancer à l’âge de 66 ans le 1er mai 1997.