Éliane de Latour, anthropologue et cinéaste, porte un regard de l’intérieur sur les mondes fermés de ceux que l’on repousse derrière une frontière physique ou sociale. Par le cinéma, la photo, l’écrit scientifique ou littéraire, elle traite de la réclusion sociale et son corollaire, les grandes ou les petites conquêtes de liberté. Sur ce sujet, en 1989, elle réalise un documentaire avec des personnes âgées en Cévennes, « Le Reflet de la vie », sélectionné au Festival du Réel [Prix de la Qualité CNC]. Puis vient « Contes et décomptes de la cour », 1993, un film sur des femmes cloîtrées dans un harem au Niger qui fait son ouverture officielle à la Berlinale [Forum] et obtient, entre autres, le Prix Georges Sadoul et le Gold Hugo Award au festival de Chicago. Peu à peu, elle « fictionne » son écriture en abordant les mondes de l’illégalité : prison, ghetto, clandestinité. Arrive alors « Si bleu, si calme », 1996, une incursion sensible dans le monde pénitencier français présenté en sélection officielle à Locarno [Cinéastes du présent]. Elle enchaîne avec « Bronx Barbès », 2000, tourné dans les ghettos d’Abidjan, sélectionné en compétition internationale à Locarno où il obtient une mention Spéciale du Jury et d’autres prix ailleurs. Il dépasse les records de Titanic en Afrique francophone. Dans la suite narrative du film précédent, elle met en scène « Après l’Océan » 2009 [Ex Birds of Heaven 2005], un long métrage projeté à la Berlinale [Panorama] pour sa Première mondiale. Il reçoit le Grand Prix des Cinémas du monde à Rouen. Entre temps, Éliane de Latour a mené une enquête dans le Deccan sur un esclave abyssin devenu roi dans l’Inde du 16ème dont elle a tiré un récit historique « Malik Ambar » [Ed Steinkis 2011]. Depuis 2009, elle travaille avec la photo sur les jeunes filles, entre 10 et 23 ans, qui se vendent dans les ghettos. Elle présente deux expositions à la Maison des Métallos à Paris. « Les belles oubliées », 2011, et « Les belles retrouvées », 2014. Bien qu’ayant aussi enquêté au Maroc [prisons pour mineures à Casablanca] et en France [P.J.J. Paris nord], elle est passée au cinéma sur ce sujet en Côte d’Ivoire avec « Little Go Girls », 2015.