Originaire du Maroc, José Bénazéraf sort diplômé de Sciences Po à la Libération. En 1957, alors que rien ne le destine à travailler dans le cinéma, il produit Les Lavandières du Portugal de Pierre Gaspard-Huit avec Darry Cowl et Jean-Claude Pascal, puis passe à la réalisation en 1960 avec L'Eternité pour nous, le cri de la chair, un film romantique exaltant la beauté du corps féminin. Cette oeuvre fait scandale et tout concours financier lui est retiré. José Bénazéraf fait ensuite tourner à leurs tous débuts Bruno Cremer et Mireille Darc dans Mourir d'amour, ainsi que Jean-Pierre Kalfon dans un polar très noir, La Drogue du vice, en 1962.Suivent dans les années 60 de nombreuses séries B quelquefois interdites pour cause d'obscénité. C'est notamment le cas de Joe Caligula où transparaît une haine viscérale de la bourgeoisie et dont les copies sont retirées de toutes les salles de cinéma en 1966. Tout en cherchant à biaiser avec la censure, ce " Buñuel de l'érotisme" continue de rendre ses lettres de noblesse à l'acte d'amour, comme en témoigne Frustration, qui met en scène, en 1971, un trio amoureux composé d'une jeune femme célibataire (Janine Reynaud), de sa soeur (Elizabeth Teissier) et du mari de celle-ci (Michel Lemoine), un médecin blasé.En 1975, la loi de finances du 31 décembre institue la classification des films pornographiques et d'incitation à la violence. C'est l'âge d'or du X et José Bénazéraf va s'en donner à coeur joie. Sa mise en scène devient de plus en plus crue, mais sa détermination à associer à l'érotisme la violence ou la politique reste intacte. En cette époque warholienne où la sexualité est considérée comme chic, intellectuelle et bourgeoise, il oppose une vision délibéremment gauchiste. Tournés, comme il l'avoue, "sans réelle passion, avec un sens profond de la dérision", ses films underground aux atmosphères troubles constituent de grands poèmes visuels, véritables odes à la lubricité.Jusqu'au milieu des années 80, José Bénazéraf tourne à la va-vite de nombreux pornos, classiques du genre aux titres explicites, en y glissant toujours sa patte provocatrice et ses citations philosophiques : José Bénazéraf 1 (1975), une oeuvre brute de décoffrage qui ne s'embarrasse d'aucune intrigue, La Veuve lubrique (id.), La Soubrette perverse (id.), Une garce en chaleur (1977), Bordel SS (1978), Nicole par-dessus, par-dessous (1979), Le Majordome est bien monté (1983), dans lesquels ont tourné tour à tour les stars de l'époque comme Brigitte Lahaie et Alban Ceray. Le précurseur du X tombera dans l'oubli avec la fin du 35 mm et l'avénement de la vidéo.