Fille d'artistes de music-hall reconvertis dans l'exploitation d'une salle de cinéma, la petite Frances Ethel Gumm dévoile ses talents à l'âge de 2 ans lors d'un spectacle de Noël. Elle forme bientôt avec ses soeurs aînées Mary Jane et Virginia les Gumm Sisters, trio qui multiplie les shows en Californie, où la famille s'installe en 1926. C'est aussi au sein des Gumm Sisters qu'elle fait sa première apparition à l'écran, dans le court métrage musical The Big revue, en 1929.
Ne tardant pas à devenir la principale attraction du groupe, l'enfant prodige se choisit pour pseudonyme Judy Garland. En 1935, Louis B. Mayer, bluffé par ses performances vocales, lui fait signer son premier contrat. La MGM la fait tourner en 1936 dans le court métrage "Every sunday" aux côtés d'une autre actrice en herbe, Deanne Durbin -ce qui permet au studio de comparer leur talent- et la "prête" à la Fox le temps de la comédie musicale Le Kiosque à musique. La même année, elle enregistre son premier disque -un contrat avec le label Decca suivra dès 1937. Après une prestation très remarquée lors de l'anniversaire de Clark Gable, elle incarne une admiratrice de l'acteur à la fine moustache dans "Broadway Melody of 1938".
Partenaire de Mickey Rooney sur les planches depuis 1933, elle forme avec lui un tandem populaire dans plusieurs films ("Thoroughbreds don't cry" en 1937 et plus tard la série des "Andy Hardy"). Propulsée en haut de l'affiche par la MGM ("Everybody sing", "Listen, Darling", sortis en 1938), elle accède à La consécration en 1939 avec Le Magicien d'Oz de Victor Fleming, qui lui vaudra un (très rare) Oscar du jeune talent. Couettes et souliers rouges, elle incarne à merveille Dorothy, orpheline transportée dans un monde féerique. Son interprétation du morceau Over the rainbow marquera durablement les esprits. La même année, le triomphe de Place au rythme asseoit son statut de star précoce.
S'imposant comme la reine de la comédie musicale qui connait alors son âge d'or, Judy Garland brille dans les films chorégraphiés par Busby Berkeley, tels que Débuts à Broadway, Girl Crazy ou encore Pour moi et ma mie avec Gene Kelly en 1942. La jeune femme enchaîne à un rythme soutenu les tournages, auxquels viennent s'ajouter les albums, concerts et autres émissions de radio. En parallèle, un premier mariage malheureux en 1941 marque le début d'une vie privée agitée. Radieuse dans Le Chant du Missouri (1944), enchanteur portrait de famille, elle épouse son réalisateur, Vincente Minnelli, père de sa fille Liza, qui la dirigera ensuite dans "Ziegfeld Folies", "L'Horloge" -dans lequel elle ne chante pas- et Le Pirate (1948). Pendant le tournage de ce dernier film, l'actrice, épuisée, tombe malade. Avant d'être renvoyée par la MGM en 1950, elle aura tout de même l'occasion de danser aux côtés de Fred Astaire (Parade de printemps).
Au début des années 50, la carrière de Judy Garland, alors mariée à un manager, se poursuit sur scène. En 1954, en contrat avec la Warner, elle réussit son retour au cinéma avec Une Étoile est née de Cukor. Celle qui a déjà un passé de star campe avec une grâce troublante une actrice en pleine ascension -l'Oscar lui échappe de peu. Loin d'enchaîner les films, elle se consacre essentiellement au music-hall (son concert au Carnegie hall en 1961 est entré dans la légende) et présente des shows télévisés. Ses derniers films se caractérisent par leur dimension dramatique : Jugement à Nuremberg (avec à la clé une nouvelle nomination à l'Oscar), Un Enfant attend de Cassavetes, ou L' Ombre du passé (son dernier rôle en 1963), portrait d'une vedette qui a sacrifié sa vie personnelle. Si elle continue de chanter devant des fans conquis, elle peine à trouver une stabilité personnelle, entre séjours à l'hôpital et unions éphémères. A 47 ans, elle succombe à une overdose de médicaments. Devenue une icone, Judy Garland, artiste virtuose et femme fragile, reste l'un des symboles les plus éclatants de l'ambivalence du star-system hollywoodien.