On connait tous plus ou moins l’histoire de Greta Thunberg, une adolescente de 15 ans qui durant l’été 2018 entama une grève scolaire devant le Parlement suédois contre l’inaction face au changement climatique. Un an plus tard elle faisait la couverture du Time au titre de personnalité de l’année, et des millions d’adolescents partout dans le monde rejoignaient son action.
Ayant le syndrome d’Asperger, sa capacité de concentration lui a permis d’analyser des données scientifiques sur le changement climatique, parfois mieux que beaucoup de responsables politiques et surtout concentrée sur l’essentiel, sans que sa pensée puisse être déviée du seul constat qui vaille d’être considéré, l’action humaine sur le changement climatique et ses conséquences irréversibles si l’on n’agit pas rapidement.
Au début, les gouvernants essayèrent de récupérer son image avec une condescendance paternaliste habituée à digérer toutes les dissidences. Mais ils n’étaient pas préparés à sa concentration, à la force de son plaidoyer, le fameux « How dare you ? » du discours aux Nations Unies. Après ce discours, tous les tenants des différents pouvoirs lui sont tombés dessus, donnant ce spectacle sidérant de dominants s’attaquant à une enfant de toutes les manières les plus ignobles. Car elle ne se contentait pas de dire qu’il faut sauver le climat, elle pointait les responsabilités, notamment celle du libéralisme générant des inégalités, elle remettait en cause l’ordre établi et le faisait avec la force d’une histoire dont l’humanité était prête à s’emparer. Ils ne s’y trompaient pas, ce n’était pas seulement une adolescente, mais le nouveau récit qui pouvait fédérer le monde entier et renverser l’ordre établi. La charge contre elle fut d’autant plus violente, par une myriade d'évêques de Beauvais requérant le bûcher sur tous les plateaux, dans toutes les langues, son mérite fut d’autant plus grand à résister.
Ce documentaire est précieux car il nous permet de mieux voir, au-delà du bruit médiatique, cette personnalité, pas seulement le récit que chacun a voulu voir en elle. Témoins de sa fragilité, de l'intelligence et la lucidité de son rire face à l'absurdité des gesticulations de la société durant cette année 2019, jusqu'au discours à New York, on prend la mesure de sa volonté et l'on comprend mieux que la force de sa geste réside dans l'humilité de l'énergie qu'elle déploie. En s'effaçant elle nous renvoie à nos responsabilités, nous oblige. Deux ans, une pandémie et un rapport du GIEC plus tard, il ne s'agit déjà plus d'elle. La forêt brûle et nous regardons les cendres, « how dare we ? ».