montana62
Le 07-05-2010
montana62, le 07-05-2010
Reformer le couple du Titanic dix ans après, semblait dans un premier temps ternir cet amour inachevé et destiné à l'éternité cinématographique et surtout pouvait laisser présager une opération commerciale sans intérêt, mais c'était mal connaître Sam Mendès et ses acteurs plus préoccupés à rendre hommage au septième art qu'à faire tourner le compteur de la rentabilité.
Un regard furtif, des doigts qui s'entrecroisent, une dispute violente sur le bas côté de la route, le réalisateur prend un sacré raccourci dans son préambule pour nous présenter une dizaine d'année commune dans un couple. Nous sommes dans les années 50, dans un quartier de classe moyenne, nous suivons cet homme s'étioler dans un métier qui l’ennuie, nous voyons cette femme s'asphyxier dans le rôle de la ménagère, ce couple qui s'était juré de combattre la monotonie conjugale se voit frappé de plein fouet par cette épidémie incurable. April propose à Frank pour sauver leur couple, de lâcher cette sécurité étouffante pour tenter à Paris d'accomplir enfin leurs rêves de jeunesse et surtout vivre.
Derrière ce postulat, Sam Mendès va tisser inexorablement un regard d'un pragmatisme terrible, la vie d'un couple basique avec ses convenances pesantes, ses mensonges salvateurs, ses plaisirs amers et surtout ses envies refoulées. Chaque fêlure est distillée avec une intelligence exemplaire, le point de non retour de cette mort programmée du couple nous renvoie à la face toute la complexité humaine en nous offrant le terrible choix de ces deux couples antinomiques avec les conséquences que l'on connaît. Le choix final de ce vieil homme dans la dernière scène est à l'image du film une petite merveille.
L'adaptation du roman de Richard Yates trouve ici un magnifique écrin aidé il est vrai par un casting de grande classe. Kate Winslet nous subjugue par sa détresse contenue, Leonardo DiCaprio nous émeut par sa décontenance et Michael Shannon nous hypnotise en mettant à nue l’âme humaine dont l‘évidence en devient presque gênante.
On peut reprocher au réalisateur d'avoir tuer ce couple mythique en les sauvant du naufrage en eaux glaciales pour mieux les noyer dans celui de la vie conjugale, mais filmé de cette manière, on ne peut que le pardonner.