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Homme à la carrière logique, comme beaucoup de ce collègues metteurs en scènes, Spike Jonze a démarré sa carrière par la réalisation de clips musicaux pour des artistes de touts bords tels que Les Beasties Boys, R.E.M, Björk, Puff Daddy ou encore les Daft Punk. En parralèle à ça, Spike Jonze a réalisé une dizaine de court-métrages, mais également une dizaines de moyen-métrage. Véritable homme à tout faire, il fût également producteur des films Jackass et acteurs dans une petite dizaine de films comme Les Rois du Désert de David O. Russell ou encore Hannibal signé Ridley Scott. Même si vous ne le connaissiez pas, il faut savoir qu'il a forcément travaillé avec quelqu'un ou sur un projet dont vous avez connaissance. Amateur de la pop-culture, la carrière de Spike Jonze baigne dans ce registre et ce n'est pas avec surprise que nous le retrouvons aujourd'hui aux commandes d'un film atypique, mais intemporel, car bercé par la volonté de toucher chacun au plus profond de soit-même.
Her nous conte l'histoire d'un homme dont la vie amoureuse fût brisée en plein vol par une demande en divorce soudaine et inexplicable. Theodore Twombly ne comprends pas ce qui lui arrive et désespère à l'idée de devoir sans cesse se remettre en question. Il se demande comment il est possible de se relever après avoir reçu un tel coup de poignard. Affecté au plus profond de lui-même, est-ce que la flamme qui brulait en son fort intérieur peut se raviver malgré cette bourrasque de vent qui l'a fait s'éteindre ? Pouvant être grossièrement décrit comme une simple histoire d'amour, Spike Jonze ose et va plus loin en nous offrant une véritable leçon sur l'amour tout en nous permettant de nous poser la question existentielle : qu'est-ce que l'amour ? En nous projetant dans un monde futuriste où les OS sont capable de prendre vie et de vous suivre nuit et jour, Spike Jonze développe plusieurs thématiques centralisé sur le thème de l'amour. Alors que le numérique est omniprésent dans nos vies, Spike Jonze se demande si une intelligence artificielle peut combler un homme et le rendre heureux. Même si cette intelligence artificielle à la voix de Scarlett Johansson, le plus important réside dans le fait de savoir si cette intelligence artificielle a elle-même conscience de ce qu'elle est et du bonheur ou du mal qu'elle peut procuré à un humain. Sans dérivé de sa thématique de base grâce à des fondations solides qui résident dans l’écriture des personnages principaux comme secondaires, Spike Jonze va très loin dans sa réflexion sur l'amour en allant jusqu'à sa finalité. A aucun moment il ne va tirer des conclusions hâtives sur les questions qu'il se permet de poser aux spectateurs. Il va prendre le temps de nous dévoiler dans le moindre détails ses propres réponses afin que par la suite nous pussions apporter notre pierre à l'édifice.
Outre les thématiques utilisées par le scénario, il nous reste un personnage principal très important interprété par Joaquin Phoenix. Celui-ci permet à chacun de pouvoir s'identifier afin de se projeter dans ce monde lumineux où l'amour est omniprésent, mais dans lequel on passe à coté sans le voir. Enfermé dans sa bulle à cause de sa déception sentimentale, Theodore Twombly passe a côté de la vie qui s'offre à lui. Il est vidé de tout espoir et le spectateur le ressent grâce à la remarquable écriture de Spike Jonze, mais également grâce à la réalisation - une majorité de plans fixes et serrés sur le personnage principal afin de faire passé un maximum d'émotions -, la mise en scène - minimaliste, mais toujours dans la volonté de faire passé une émotion et de mettre en avant les personnages comme les décors -, la bande-sonore - qui repose sur des mélodies jouées au piano, qui sont à la fois percutantes et bouleversantes - et la magistrale interprétation de Joaquin Phoenix.
Film contemplatif à la photographie magnifique qui joue en permanence avec la lumière, qu'elle soit naturelle ou artificielle, et où le spectateur se laisse bercé au grès du vent par les mouvements du personnage principal, Her est sublimé par l'impressionnante interprétation de Joaquin Phoenix. Acteur remarquable pouvant passé en une fraction de seconde du pote qu'on aimerait tous avoir à un homme détestable, il est encore une fois phénoménal dans ce film. Il porte le poids du monde sur ses frêles épaules. On ressent ce poids et il nous affecte également. Touchant et ne surjouant à aucun moment, il ne fait pas ressentir de la pitié au spectateur, mais une empathie qui se transformera en amitié sincère qui ira jusqu'à nous bouleverser à certains moments. Pouvant à sa guise provoquer le rire comme les larmes, c'est un acteur remarquable qui fait vivre un scénario sensible écrit avec le cœur et dont la volonté première est de toucher les spectateurs. Un chef d’œuvre, un bijou, un film qui marquera à coup sûr 2014 et plus encore on l'espère !
Romance virtuelle
Imaginons un monde où les ordinateurs auraient acquis une conscience. Conscience d'eux-mêmes, conscience des autres. Un monde où les ordinateurs seraient capables d’interagir intelligemment avec chacun d'entre nous. C'est dans ce futur plus ou moins proche que nous projette Spike Jonze, dans une ère numérique nouvelle, où toute ressemblance avec notre réalité ne serait pas totalement fortuite…
C'est à Los Angeles, ville de tous les possibles, que commence notre histoire. Théodore (Joaquin Phœnix, extraordinaire) est un modeste écrivain public de l’ère numérique, travaillant pour une start-up spécialisée dans les liaisons épistolaires : beautifulhandwrittenletters.com. Il compose des lettres – souvent d'amour – que lui commandent des inconnus qui veulent écrire à un proche et qui s'en sentent incapables. À défaut d'être réellement écrites à la main, ces lettres sont dictées à un ordinateur qui en reproduit une écriture manuscrite. Théodore maîtrise comme personne le vocabulaire des sentiments, les mots d'amour lui viennent tout naturellement quand il parle pour les autres… et pourtant c'est un solitaire, dévasté par son mariage raté avec Catherine. Les longues nuits passées dans son appartement un tantinet trop spacieux pour un célibataire sont en grande partie consacrées à un jeu vidéo futuriste dont les décors en 3D flottent dans le vide du salon.
Guidé par un petit extra-terrestre au langage ordurier (Spike Jonze himself), Théodore a tout du post-adolescent désocialisé. Amy, sa meilleure amie, et ses collègues de boulot aussi doux qu'attentionnés avec lui n'arrivent pas à panser les plaies de sa solitude. Sa vie un peu morne, pas mal triste, sera bientôt dynamitée par l'achat d'un programme informatique ultramoderne, habité par la voix de Samantha (Scarlett Johansson). Une intelligence artificielle conçue pour s'adapter à chaque personnalité et répondre à tous les besoins, qui s'exprime à travers une voix féminine suave, intuitive et étonnamment drôle, dont Théodore va peu à peu tomber amoureux… Alors qu'Amy et ses collègues semblent accepter sans sourciller cette relation virtuelle, Théodore est bousculé dans ces certitudes par le cas de conscience de Samantha : « Mes sentiments sont-ils réels ou est-ce juste de la programmation ? ». Rien ne semble pourtant plus réel que leur première nuit d'amour, lorsque la voix sensuelle et éraillée de Samantha atteint son paroxysme.
Voici le point de départ d'une idylle insensée qui nous emporte dans un univers que la profusion de détails imaginée par Spike Jonze rend à la fois intensément réaliste, follement romantique et doucement poétique. Samantha devient le métronome de la vie de Théodore, planifiant ses rendez-vous, lisant ses e-mails… Une relation dont il est difficile de se détacher tant ils semblent irrémédiablement liés. Théodore l'emmène à la plage ou au centre commercial en lui donnant les yeux de son smartphone placé judicieusement dans la pochette de sa chemise… Ne pas en dire plus pour ne pas vous enlever le plaisir délicieux de découvrir toutes les inventions, toutes les surprises que réserve le film.
Joaquin Phœnix est impressionnant de justesse et de charisme dans un registre qui ne lui est pourtant pas coutumier. Il incarne instantanément Théodore, nous rend palpable la mélancolie d'un homme qui trouve refuge dans cet amour virtuel, « plus humain que l'humain » pour citer Philip K.Dick. Il irradie chaque plan de la grâce subtile de ses sentiments, de ses doutes, de ses fêlures. Et n'oublions surtout pas la performance étonnante de Scarlett Johansson, qui donne sa voix rocailleuse et incroyablement vivante à Samantha. Une prestation vocale qui lui a valu le Prix d'Interprétation féminine au dernier Festival de Rome. Une première !